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France : Macron face à l’influence grandissante des Frères musulmans

NIZAR JLIDI

 

En plein été, le président Emmanuel Macron a réuni le Conseil de défense et de sécurité nationale pour une session exceptionnelle, dans un contexte marqué par la vigilance et la fermeté. L’objectif annoncé : freiner la progression des Frères musulmans sur le territoire français, un mouvement dont l’influence suscite depuis plusieurs années de vives inquiétudes. Cette réunion fait suite à la publication, au mois de mai, d’un rapport alarmant pointant un « enracinement par le bas » de la confrérie, capable, selon les experts, de fragiliser le lien social et la cohésion nationale.

Lors de cette rencontre, le chef de l’État a présenté une batterie de mesures concrètes : gel des fonds et des donations, création de nouveaux outils de sanctions financières et administratives, et élaboration d’un projet de loi visant à renforcer ces dispositifs avant la fin de l’année. L’automne prochain sera également l’occasion d’un dialogue avec le Forum de l’islam de France (Forif), afin de confronter les points de vue et de préciser les axes de coopération.

Une présence diffuse mais structurée

Les analyses des services de renseignement et des chercheurs spécialisés révèlent une implantation de plus en plus structurée. Les réseaux liés aux Frères musulmans s’infiltrent à travers les mosquées, les associations sportives et culturelles, ainsi que diverses initiatives sociales. Selon les chiffres rapportés par plusieurs médias et la chercheuse Hélène de Luzon, le nombre de membres aurait doublé depuis 2019, passant de 50 000 à près de 100 000.

Cette progression s’accompagne d’une visibilité accrue des pratiques religieuses dans l’espace public et professionnel, et d’une expansion des services et produits halal. Le Centre européen d’études du renseignement et de la sécurité souligne que la confrérie a su bâtir une « double puissance », intellectuelle et financière, nouant des liens avec certains acteurs politiques locaux. Parmi les quelque 250 associations islamiques recensées en France, une cinquantaine seraient directement liées aux Frères musulmans et certaines viseraient un projet politique à long terme, inspiré par le modèle califal.

L’influence financière sous contrôle             

Le financement de la confrérie reste une préoccupation majeure. Des enquêtes journalistiques ont mis en lumière l’existence d’une vingtaine de fonds de dotation servant de relais financiers, dont huit ont déjà été interdits. Les structures associatives légales permettent ainsi de diffuser l’idéologie de la confrérie tout en plaçant ses membres dans des postes stratégiques, créant un réseau d’influence discret mais efficace.

Les autorités soulignent que cette emprise, même sans acte violent, constitue une menace pour les institutions républicaines et le lien social. Les attentats tragiques de ces dernières années Charlie Hebdo en 2015, Nice en 2016, ou encore les attaques isolées dans le sud de Paris rappellent l’enjeu de cette surveillance.

Une problématique européenne

Le phénomène dépasse la France. En Suisse, la question de l’influence des Frères musulmans est désormais discutée au Parlement. La députée Jacqueline de Quattro a demandé un audit approfondi de l’influence religieuse, éducative et sociale afin de vérifier la compatibilité avec la neutralité confessionnelle inscrite dans la Constitution. Dès 2017, un plan de prévention du radicalisme avait été lancé à Berne, avec renforcement des sanctions, élargissement des pouvoirs de la police fédérale et réforme de la loi sur le renseignement.

Une stratégie d’influence subtile

Selon les experts, la confrérie repose sur des relais bien identifiés : imams, responsables associatifs et gestion serrée des centres culturels. Cette implantation lui permet de se présenter comme un acteur modéré, intégré et engagé dans la lutte contre l’extrémisme, tout en consolidant son influence sur le long terme.

Face à ces enjeux, la France conjugue fermeté législative et vigilance opérationnelle. La recomposition identitaire de la société et la lutte contre l’influence de réseaux idéologiques étrangers demeurent au cœur des débats, avec un impact direct sur la cohésion sociale et la sécurité nationale

 

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