
J’accuse le silence qui tue..J’accuse le monde occidental de se laver les mains dans le sang des peuples qu’il prétend sauver.
J’accuse les élites qui se parent des mots “droits humains” comme on se met du parfum sur une plaie purulente.
J’accuse ceux qui ont pleuré Charlie mais qui ne versent pas une larme pour Anas Al-Sharif, pour Mohammed Qreiqeh, pour les centaines de journalistes gazaouis assassinés dans leurs tentes, sous leurs gilets “PRESS”, en plein exercice de leur métier qui est aussi un devoir universel : témoigner.
Où sont passés vos #hashtags, vos marches blanches, vos larmes télévisées ? Où sont vos bougies ? Où est ce “Je suis” que vous brandissiez quand le sang coulait sur vos trottoirs ?
Aujourd’hui, le sang coule sur les trottoirs de Gaza, et vos écrans sont éteints.
Le crime et le silence
Le 10 août 2025, Israël a visé une tente de journalistes à Gaza. Six reporters ont été tués, dont Anas Al-Sharif, 28 ans, voix et visage courageux d’Al-Jazeera, devenu symbole de cette guerre pour avoir montré ce que les puissants veulent cacher. L’armée israélienne l’a qualifié de “terroriste du Hamas” exactement comme on traite de “barbare” celui qui ose parler d’humanité face à la barbarie coloniale.
Parmi les autres victimes ce jour-là :
Mohammed Qreiqeh, 33 ans, reporter, qui documentait les bombardements et racontait les histoires des familles touchées par la guerre.
Ibrahim Zaher, 25 ans, cameraman, toujours derrière l’objectif pour montrer la réalité des enfants et des civils de Gaza.
Mohammed Noufal, 29 ans, cameraman et chauffeur, qui faisait le lien entre les équipes sur le terrain et les rédactions, souvent exposé à la ligne de front.
Moamen Aliwa, caméraman passionné par la narration visuelle, qui croyait que son travail pouvait éveiller les consciences.
Un journaliste freelance dont le nom restera pour nous un symbole de la liberté de la presse sacrifiée pour la vérité.
Depuis octobre 2023, plus de 230 journalistes et travailleurs des médias palestiniens ont été tués. Chaque nom raconte une histoire :
Duaa Sharaf, radio Al-Quds, tuée avec sa fille par un bombardement sur leur maison. Femme et mère, elle portait la voix de son peuple.
Yahya Sobeih, reporter indépendant, tué quelques heures après fêter la naissance de sa fille, un jeune père déterminé à montrer la vie dans la Gaza assiégée
Hossam Shabat, 23 ans, reporter pour Al-Jazeera, tué en mars 2025 alors qu’il couvrait une distribution de nourriture aux familles bloquées.
Ismail Abu Hatab, photojournaliste, assassiné lors d’un strike sur la cafétéria du port populaire de Gaza.
Hassan Aslih, éditeur et directeur d’Alam24, tué dans un hôpital où il venait couvrir les blessés.
L’Occident, ce grand illusionniste
Le monde occidental a inventé la démocratie comme un produit d’exportation. Mais c’est une marchandise à double prix : gratuite pour lui, inaccessible pour le reste du monde. On nous parle d’État de droit, de liberté de la presse, d’égalité… jusqu’à ce que ces principes entravent les intérêts stratégiques. Alors, tout s’efface.
Vos parlements votent des sanctions contre des régimes qui ne plaisent pas à vos marchés.
Vos ONG publient des rapports sur des dictatures qui ne signent pas vos contrats.
Vos journalistes s’indignent quand la victime ressemble à votre voisin.
Mais quand la victime parle arabe, quand elle est née sur une terre occupée, son meurtre devient un “dommage collatéral”.
Et que dire des associations “humanistes” ?
Les mêmes qui se bousculent pour défendre la liberté d’expression quand une caricature insulte une religion, mais qui ferment la bouche quand la liberté d’expression s’exerce contre un État qui bombarde des hôpitaux et affame un peuple. Vous nous avez vendu la fraternité comme un idéal universel.
Ce n’était qu’une chimère.
Un maquillage épais pour couvrir les déformations coloniales qui persistent dans vos mentalités, dans vos alliances, dans vos budgets militaires.
Deux poids, deux mesures : l’ADN de votre diplomatie
Lorsque des journalistes sont tués en Europe, c’est un crime contre l’humanité. Lorsque des journalistes sont tués à Gaza, c’est un “incident malheureux” sur lequel il faut “faire la lumière” jamais trop vite, ni trop fort, ni trop profondément, de peur de déranger l’allié qui vend vos armes et sécurise vos intérêts au Moyen-Orient.
J’accuse vos rédactions internationales, qui répètent mécaniquement le langage des communiqués militaires israéliens, comme si un mensonge répété devenait vérité.
J’accuse vos envoyés spéciaux qui couvrent des guerres sans jamais franchir le mur de séparation, qui commentent la famine depuis des studios climatisés, pendant que les voix libres sont exterminées dans leurs tentes.
J’accuse vos éditorialistes, vos experts et vos analystes, qui réduisent les massacres à des “conflits complexes”, des “tensions régionales” ou des “dommages collatéraux”, effaçant toute humanité derrière des mots froids.
J’accuse vos chaînes d’information qui choisissent les images à diffuser comme on sélectionne des produits dans un catalogue, cachant la misère, la peur et le sang pour ne pas heurter votre public.
J’accuse vos agences de presse de transformer la souffrance en statistiques, de transformer des noms en chiffres, des visages en anonymes, effaçant les individus derrière des numéros et des codes de conflit.
J’accuse vos gouvernements qui parlent de paix et de diplomatie tout en alimentant les guerres par le commerce des armes, la complicité politique et le silence stratégique.
J’accuse tous ceux qui ferment les yeux sous prétexte de “neutralité”, alors que leur silence protège les assassins et tue l’espoir.
Le droit international comme théâtre d’ombres
Vous brandissez le droit international comme un talisman, comme une prière que l’on récite machinalement, sans y croire, pour calmer vos consciences et masquer vos crimes. La Cour pénale internationale ? Un outil sélectif, un théâtre d’ombres. Quand un président africain ou arabe vous déplaît, vous ouvrez un dossier, vous décrétez une enquête, vous parlez de justice universelle. Mais quand Israël bombarde des camps de réfugiés, détruit des écoles de l’ONU, tue des civils qui n’ont jamais brandi d’arme contre vous, vous vous perdez dans des procédures interminables, des “investigations approfondies” qui finissent toujours par manquer de preuves… comme si les corps ensanglantés n’étaient pas des preuves suffisantes, comme si les enfants enterrés sous les décombres n’étaient pas des témoins.
Et pendant que vos tribunaux et vos chancelleries tergiversent, la liste des morts s’allonge, impitoyable, insoutenable. Plus de 200 journalistes assassinés en 22 mois — des hommes et des femmes qui avaient choisi d’éclairer la vérité et non de la camoufler. Plus de 40 000 civils en moins de deux ans, déchiquetés par vos bombes, étouffés par votre indifférence. Des enfants ensevelis par dizaines, parfois avec leurs carnets d’école serrés contre eux, comme si leur innocence pouvait protéger de vos obus et de vos calculs politiques.
Le monde regarde et détourne le regard. Le droit international n’est plus qu’une farce, un masque pour vos complicités. Vos mots “justice”, “humanité”, “responsabilité” résonnent dans le vide, pendant que la terre de Gaza se gorge de sang et que les cris étouffés des survivants restent prisonniers de vos salles de réunion glacées.