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Ukraine : le rôle ambigu des Européens dans un conflit à géométrie variable

Nizar jlidi

 

Alors que la guerre en Ukraine entre dans sa troisième année, les Européens tentent de définir leur rôle, oscillant entre présence militaire et diplomatique, dans un contexte international complexe où la Russie et les États-Unis dictent souvent le tempo des négociations.

Les Vingt-Sept avancent avec prudence, utilisant des termes comme « présence » pour ne pas compromettre l’avenir. Leur stratégie repose sur deux axes : fournir à l’Ukraine des garanties de sécurité via la coalition des « volontaires » qui regroupe 31 pays et coordonner ces efforts avec l’Union européenne et l’Otan.

L’objectif est d’éviter de reproduire les erreurs des accords de Minsk, perçus comme fragiles et facilement violables par Moscou. Mais pour la Russie, la logique est inverse : selon le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, « la Russie elle-même devrait fournir des garanties de sécurité à l’Ukraine », refusant tout rôle européen direct sur le terrain.

Pour les Européens, l’Ukraine reste « l’avant-poste » de la sécurité européenne. La France, par exemple, préconise de doter le pays d’une armée conséquente, capable de déployer plusieurs centaines de milliers de soldats.

Avec 900 000 hommes, soit quatre fois plus qu’en 2021, l’armée ukrainienne est désormais la plus importante du continent. À cette force s’ajouterait le concept de « forces de réassurance », héritage de la guerre froide, destinées à dissuader la Russie plutôt qu’à jouer un rôle de maintien de la paix neutre. Toutefois, cette option demeure théorique tant qu’un cessez-le-feu n’est pas instauré, ce que Moscou refuse catégoriquement.

L’influence des États-Unis reste déterminante. Les propositions française et britannique, bien que détaillées, demeurent hypothétiques sans un engagement clair de Washington. Les Européens, relégués à la périphérie des discussions bilatérales entre Moscou et Washington, cherchent avant tout à réaffirmer l’unité du « camp occidental » et à rapprocher la position américaine de celle de l’Europe. Le président français Emmanuel Macron ne cache pas son pragmatisme : « Est-ce que je pense que le président Poutine veut la paix ? Non. Est-ce que je pense que le président Trump veut la paix ? Oui. »

Dans cette diplomatie à plusieurs vitesses, l’Ukraine joue un rôle stratégique. Volodymyr Zelensky, accompagné de ses alliés européens, cherche à maintenir l’attention de Donald Trump sur le conflit, espérant que l’ancien président américain se convaincra du manque de volonté de Moscou et soutiendra un renforcement des sanctions contre les pays commerçant avec la Russie. Cette approche vise à sortir l’Europe de l’étau imposé par la confrontation directe entre Moscou et Washington, et à garantir que les intérêts de l’Union européenne ne soient pas sacrifiés dans des négociations où elle n’est pas maître du calendrier.

Malgré l’incertitude, la position européenne reste claire : maintenir un soutien militaire et diplomatique à l’Ukraine, protéger le continent contre toute menace et éviter qu’un cessez-le-feu fragile n’ouvre la voie à un nouveau conflit. Dans ce contexte, chaque décision, chaque déclaration, chaque déplacement diplomatique est scruté, alors que le sort de l’Ukraine continue de peser lourdement sur l’avenir de la sécurité européenne.

 

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